Sécurité

La sécurité des certificats SSL en cause

lock-iconDes spécialistes venant des USA, des Pays-Bas et de Suisse (Alexander Sotirov, Marc Stevens, Jacob Appelbaum, Arjen Lenstra, David Molnar, Dag Arne Osvik, Benne de Weger) ont annoncé avoir mis en défaut les certificats de sécurité SSL de sites Web émis par des sociétés de sécurité reconnues, lors du 25C3, la conférence Chaos Communication Congress 2008 organisée par le Chaos Computer Club allemand, qui s’est tenue à Berlin du 27 au 30 décembre 2008.

Tout d’abord, à quoi cela sert-il ? Différents algorithmes sont utilisés pour produire des « hachages » sensés représenter de façon unique tout document numérique. Les fonctions de hachage à usage cryptographique doivent posséder différentes caractéristiques :

  • la très grande difficulté de retrouver ou de recalculer le document numérique initial ;
  • à partir d’un premier document et de sa valeur de hachage, il est très difficile de retrouver un document numérique ayant la même valeur de hachage (en particulier, toute modification, même mineure, du document initial, entraîne une modification très importante de la signature calculée) ;
  • il est très difficile de tomber au hasard sur deux documents ayant la même valeur de hachage.

Par document numérique, on entend une suite d’octets de longueur non nulle (un fichier informatique, un flux d’informations numériques, …) Mais, on comprend donc très bien que ces fonctions qui à tout document numérique associent un nombre dont la longueur est donnée, ont forcément un risque de collision non nul. En effet, puisque la variété des documents numériques de toutes tailles est infinie et que l’on cherche à la représenter par une valeur finie, il y a pour chaque valeur de hachage un grand nombre de documents numériques théoriquement possible.

Il existe différentes fonctions de hachage utilisées classiquement: MD5, SHA-1, Tiger,… La longueur des signatures MD5 est de 32 octets ou 128 bits. Dans un certificat utilisé pour identifier un serveur web, cette fonction de hachage est utilisée sur l’ensemble des informations contenues dans le certificat (le nom du serveur, ses dates de validité, etc.) et c’est cette valeur qui est ensuite signée numériquement par une fonction cryptographique. Sur l’image ci-dessous vous pouvez-lire ces différentes informations pour le certificat SSL du site web www.verisign.com :

Certificat www.verisign.com

Plus précisément, ces certificats sont signés par une autorité de certification qui est elle-même reconnue par une autorité de certification « racine ». Ce sont – normalement – les certificats de ces autorités de certification « racines » qui sont pré-installés dans nos navigateurs (il est possible d’en installer volontairement d’autres, en fonction de besoins internes à son entreprise par exemple).

Dès 2004, des chercheurs ont démontré qu’il était possible de fabriquer des documents différents possédant la même signature MD5.  Ce qui a été rapidement très inquiétant c’est qu’il était possible de fabriquer des documents très ressemblants (des PDF par exemple) ayant la même signature, mais dont un élément important était différent (dans l’exemple présent sur ce site : http://www.win.tue.nl/hashclash/Nostradamus/, 12 documents prédisant le résultat de l’élection présidentielle avec des noms différents).

Ce qui est inquiétant aujourd’hui c’est que d’importants prestataires en matière de fourniture de certificats permettant d’identifier des sites web (et d’autres fonctions de signature électronique en fait), autorités de certification reconnues par tous les navigateurs Internet, autorisent encore la fabrication de certificats basés sur des hachages MD5.

De façon assez amusante, mais pas surprenante étant donnée la puissance de calcul des consoles de jeux, les chercheurs qui ont présenté leurs résultats au 25C3 ont utilisé des batteries de consoles Sony Playstation 3. Ils ont ainsi démontré qu’il était possible de fabriquer, pour un coût assez raisonnable un certificat pour une autorité de certification « pourrie ». Cette autorité de certification leur permet de fabriquer des certificats reconnus par la plupart des navigateurs Internet.

Quelle réponse apporter ?

Les auteurs de cette démonstration donnent un certain nombre de recommandations :

  • ils confirment tout d’abord que les autorités de certification identifiées comme utilisant encore des fonctions MD5 ont été prévenues et sont en train de prendre des mesures immédiates (voir par exemple l’annonce de Verisign) ;
  • ne plus utiliser MD5 dans des fonctions de signature, et éviter sur de nouveaux projets d’utiliser SHA-1 (en effet, il existe différents indices montrant que SHA-1 devrait rencontrer le même sort assez rapidement…).

On peut aussi souhaiter que la profession d’autorité de certification soit un peu mieux réglementée. En effet, différentes publications ont montré récemment qu’il était possible, dans certaines conditions, d’obtenir un certificat pour un nom de domaine dont on n’est pas propriétaire…

Pourquoi est-ce que tout cela est important ? Ce n’est pas tant le risque que votre communication soit interceptée, mais surtout que vous ayez confiance dans l’identité du serveur auquel vous vous connectez.

Mais que peut faire l’utilisateur individuel en pratique ? Peut-être faire confiance aux sociétés émettrices de certificats, qui grâce au système des listes de révocation vont rapidement débarrasser l’Internet de ces certificats malhonnêtes (note du 06 janvier 22:20, encore qu’il semble qu’ils ne soient pas décidés à utiliser la révocation, pour éviter de léser leurs clients). Mais pour les applications les plus importantes (votre banque par exemple), vous pouvez jeter un coup d’œil à l’algorithme utilisé pour la signature. Voici la marche à suivre :

Sous Mozilla, par exemple, une fois connecté sur le site de ma banque, je double clique sur le cadenas de sécurité ce qui me permet d’afficher le certificat utilisé (semblable à l’image d’illustration utilisée plus haut) et je demande ensuite à afficher les détails de ce certificat. Dans la liste des caractéristiques, je retrouve un champ intitulé : « Algorithme de signature des certificats » (sous Internet Explorer, on retrouve « Algorithme de signature »). Dans mon cas cela affiche : « PKCS #1 SHA-1 avec chiffrement RSA ». Pas de MD5 ici !

Quelques dates à retenir

Des événements à venir :

Interpellations par la gendarmerie dans le « warez »

Warez

Warez

Une quinzaine de personnes suspectées d’avoir participé à un forum organisant la diffusion de contrefaçons de films sur Internet ont été interpellés mardi dans le cadre d’une opération nationale initiée par la brigade de recherches de la gendarmerie nationale de Paris-Exelmans.

La Voix du Nord signale l’interpellation dans cette affaire de trois jeunes de la région d’Arras. 01net détaille le mode opératoire : l’intrusion frauduleuse dans les systèmes d’entreprises pour disposer d’espace de stockage et la diffusion sur le forum du groupe (de la « team ») des adresses de ces serveur pour mettre à disposition les contenus contrefaits fournis par les différents membres.

Ce n’est pas la première telle opération de la gendarmerie, qui s’attaque à la source des échanges organisés de contrefaçon de musique ou de vidéo :

En juillet de cette année, le SRPJ de Montpellier avait procédé à l’interpellation des auteurs présumés (affaire Carnage) de la création d’une contrefaçon du film Bienvenue chez les Chtis (et d’autres infos ici affaire Cinefox).

Au-delà des personnes qui téléchargent ces contenus d’origine illégale, il s’agit dans ces affaires des maillons essentiels de la contrefaçon d’œuvres de l’esprit. Ils sont soupçonnes de commettre de façon concertée :

  • des actes de contrefaçon (copie des supports originaux, copie du film en salle, copie des films avant leur sortie grâce à des complicités dans les circuits de production ou de distribution…). Une telle infraction constitue un acte de contrefaçon, réprimé par le code de la propriété intellectuelle et puni d’un maximum de trois ans d’emprisonnement et de 300.000 euros d’amende et jusqu’à cinq ans et 500.000 euros d’amende pour des faits commis en bande organisée ;
  • l’intrusion dans des serveurs et la copie sur ces serveurs ainsi contrôlés des contrefaçons pour les partager avec les membres des forums de partage. De tels faits sont punis par les articles 323-1 à 323-7 du code pénal, de cinq ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende.

Évidemment, les peines maximum ne devraient pas être prononcées, toutefois, il ne faut pas négliger cet aspect particulier de la contrefaçon qui présente un risque pour les entreprises. En effet, il ne s’agit plus ici d’échanges entre « personnes consentantes » via des réseaux pair à pair, mais de l’abus des ressources de personnes innocentes – et souvent des entreprises – dont effectivement les machines étaient mal sécurisées, mais qui au mieux n’auront qu’une visite courtoise des autorités et au pire vont mettre plusieurs semaines à rétablir un fonctionnement correct de leurs systèmes.

Et il existe encore des dizaines de forums (ou « boards ») qui revendiquent de tels actes de contrefaçon. Souvent et historiquement, il s’agit de la scène « warez » de contrefaçon ou de contournement des protections des logiciels, mais de plus en plus souvent orientés exclusivement vers la musique et surtout les films commerciaux.

En conclusion, cette affaire et d’autres à venir sont une incitation supplémentaire de mieux sécuriser et surveiller correctement l’utilisation de vos machines et serveurs connectés à Internet !

Vers une sécurité renforcée des réseaux et de l’information en Europe

ec-consultationDu 07 novembre 2008 au 09 janvier 2009, la commission Européenne mène une consultation en ligne , à destination du public le plus large, sur la politique à mener au niveau de l’Union Européenne pour la sécurité des réseaux et de l’information.

Les questions portent sur trois thèmes :

  • défis : « quels sont les défis principaux pour la sécurité des réseaux et de l’information à considérer aux niveaux national, de l’UE et international, notamment en ce qui concerne la résilience des réseaux de télécommunications et des infrastructures électroniques d’information ? »,
  • priorités : « quelles seraient les trois priorités-clés qu’une politique devrait aborder pour relever les défis dus à l’évolution de la sécurité des réseaux et de l’information aux niveaux de l’UE et international ? »
  • et moyens : « Quels instruments sont nécessaires au niveau de l’UE pour aborder les défis et pour soutenir les priorités politiques dans le domaine de la sécurité des réseaux et de l’information? En particulier, quels instruments ou mécanismes sont-ils nécessaires pour améliorer la préparation pour traiter les cyber-disruptions à grande échelle et pour assurer des niveaux élevés de sécurité et de résilience des réseaux et infrastructures électroniques ? ».

Personnellement, parmi les défis, je citerais : le manque d’information sur les phénomènes, le temps de réaction disponible qui se restreint (attaques 0-day, haut débit…), les paradis numériques, la compétence des utilisateurs, l’avènement de l’identité numérique partout et de la démocratie électronique.

Mes trois priorités seraient : l’amélioration de la circulation de l’information par la confiance, la formation et le développement de capacités de réaction coordonnées (au plan national, européen ou international).

L’exemple de l’affaire McColo récente est exemplaire à ce sujet, qui a montré que finalement les acteurs techniques pouvaient agir efficacement pour lutter contre les sources de problèmes (et donc ne sont pas toujours neutres sur le réseau) et la suite nous montrera que l’absence d’action policière et judiciaire coordonnée (supposée) risque de voir rebondir les mêmes acteurs avec les mêmes compétences ailleurs… Dans d’autre cas, les services d’enquête ou les organismes officiels chargés de la sécurité informatique dans les Etats ont dû agir par leurs seuls moyens judiciaires ou administratifs, sans aucun soutien des opérateurs.

Enfin, en termes de moyens : ils doivent être juridiques (la création d’un Espace Schengen du numérique), un rôle peut-être plus opérationnel de l’agence européenne ENISA (ou une coordination ENISA/Eurojust/Europol/OLAF sur ces sujets), et une implication préventive des acteurs techniques.

A vos clavier pour contribuer vous aussi !

HCFDC – De la sécurité informatique à la cyberdéfense

img_colloque_131108

Colloque HCFDC

Le Haut comité français pour la défense civile (HCFDC) organisait le 14 novembre 2008, dans les locaux de l’INHES à la Plaine Saint Denis (93), un colloque sur la « Cyberdéfense ». Il était conclu par une intervention du sénateur Roger ROMANI qui a été le rapporteur du rapport d’information de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur la Cyberdéfense.

Ce colloque était organisé en partenariat avec le Secrétariat général de la défense nationale (SGDN) et sa Direction centrale de la sécurité des systèmes d’information (DCSSI) et sponsorisé par Agilent et Thalès.

Le programme de la conférence était organisé autour de 4 tables rondes :

  • Typologie des menaces ;
  • Cartographie, enjeux et complexités ;
  • Cibles et impacts ;
  • Réponses et solutions.

Des différentes présentations on retiendra que :

  • il est encore difficile aujourd’hui d’évaluer l’impact des différentes attaques contre les systèmes d’information en France et dans le Monde ;
  • la future agence nationale de la sécurité des systèmes d’information est en bonne voie, avec un futur périmètre bien plus large que celui de la DCSSI actuelle et donc notamment avec un impact plus important sur la sécurité de l’information des entreprises et des citoyens (certification de logiciels et de solutions de sécurité) et certainement un pouvoir de contrainte plus fort sur la sécurité existant dans les administrations ;
  • des progrès sont reconnus dans la mise en place de politiques de sécurité des SI dans les grandes entreprises, les démarches semblent beaucoup plus mûres ;
  • le constat est maintenant tangible d’une évolution vers des cyberconflits, parallèles aux conflits physiques, comme l’ont montré les incidents des derniers mois (Estonie, Géorgie, attaques imputées à des chinois, etc.) et la France, l’Europe, doivent s’y préparer ;
  • les représentants des services dits répressifs (dont moi-même) ont beaucoup insisté sur l’intérêt d’associer mieux la sphère judiciaire dans la lutte contre les abus criminels contre les systèmes d’information et notamment sur la nécessité selon les cas de porter plainte ou de signaler les faits intéressants.

J’en retire aussi qu’il subsiste un grand flou autour des évolutions à venir de l’Internet et de la démarche de cyberdéfense :

  • quel avenir pour la gouvernance de l’Internet (rôle de l’ICANN, rôle que veut se donner l’Union Européenne, rôle des nouvelles puissances extrême-orientales,…) ?
  • quel va être l’impact d’IP v6 sur la sécurité des systèmes d’information et la cybercriminalité en général ?
  • quelle direction concrète doivent prendre des pays comme la France en matière de lutte informatique offensive (le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale donne quelques pistes, page 207) ?

Chute du spam suite à la coupure de l’Internet d’un hébergeur peu sécurisé

Un hébergeur de la région de San Francisco a été déconnecté de l’Internet par ses différents fournisseurs de connectivité suite à des signalements qui soulignaient son implication dans une majeure partie des pourriels circulant ces dernières semaines sur Internet.

Dans sa suite d’articles, un journaliste, auteur d’un blog (Security Fix) du Washington Post, Brian Krebs, déclare avoir collecté de nombreuses informations démontrant l’implication des machines hébergées par la société McColo Corp. de San Jose, Californie. Après quatre mois d’observations il a décidé de contacter les fournisseurs de connectivité à Internet de cette société qui semblent avoir réagi très rapidement et ont coupé très rapidement tous les liens de cette société. Il semble que la société Kaspersky, ainsi qu’un rapport publié par HostExploit.com (ici la dernière version de ce rapport) soient la source des informations qui ont mené ce journaliste à s’activer sur ce dossier.

Selon les différents chiffres cités par le journaliste, obtenus auprès de différentes sources en Europe et aux Etats-Unis, près de 60 à 70% des spams circulant actuellement ont ainsi pu être éliminés d’un seul coup. Selon SANS, le réseau de cet hébergeur servait aussi à la diffusion d’images de mineurs à caractère sexuel.

Évidemment, une telle chute du spam sera de courte durée, et les émetteurs de ces messages non sollicités se reporteront sur d’autres ressources de l’Internet qui sont vulnérables. Le même journaliste cite en effet le cas d’un autre hébergeur californien qui avait subi le même sort au mois de Septembre 2008 et il n’avait fallu que quelques jours pour que les spammeurs trouvent de nouveaux hôtes.

A la lecture des différentes études publiées, il semblerait que les réseaux les plus utilisés par les cybercriminels ne sont pas tous situés dans les pays habituellement cités, mais ils peuvent se trouver aussi bien aux Etats-Unis et très certainement au coeur de l’Europe. C’est assez logique, puisque cela permet de disposer d’une excellente connectivité avec les futures victimes…

Un anti-virus reconnaît comme troyen une DLL de Windows

Virus

Virus

Ce n’est pas la première fois qu’un logiciel anti-virus cause de telles difficultés avec des faux-positifs. C’est toutefois moins courant que l’anti-virus en question (AVG) s’en prenne à un composant du système d’exploitation. The Register évoque l’affaire dans cet article.

La conséquence pour l’utilisateur qui supprime le fichier DLL en question : un système qui ne démarre plus.

Cela pose tout de même la question de savoir comment un particulier peut réagir efficacement face aux messages parfois incompréhensibles des logiciels anti-virus et autres firewalls. Et il en est de même pour l’usager lambda dans une entreprise.

Cela veut dire pour moi, que d’une part, même pour un logiciel aussi simple qu’un anti-virus, il ne faut pas oublier de former les utilisateurs aux actions basiques qu’il sera amené à accomplir (où est-ce que je clique ?) et prévoir des procédures adaptées en cas d’infection supposée (est-ce qu’on laisse l’utilisateur se débrouiller seul ou bien faut-il faire systématiquement intervenir quelqu’un du support informatique ?)

Mise à jour du 15/11/2008: A noter (source) qu’AVG offre à tous les abonnés à ses mises à jour payantes une année de licence gratuite.

Mise à jour du 17/11/2008: Un nouvel incident noté avec AVG qui a reconnu par erreur un composant du logiciel Adobe Flash comme malveillant. L’erreur a été corrigée en mois de trois heures.