Juridique

Forum des droits sur l’Internet – Filtrage des sites web pédopornographiques

FDI

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Le Forum des droits sur l’Internet (FDI) publiait ce matin le rapport d’un groupe de travail sur le filtrage des sites pédopornographiques. Il s’agissait d’étudier les modalités techniques et juridiques d’une telle mesure en France. Le FDI a entamé ces travaux suite à des demandes exprimées par le ministre de l’intérieur (Michèle ALLIOT-MARIE) et la secrétaire d’Etat chargée de la famille (Nadine MORANO).

Contexte international

Ce projet s’inscrit dans un projet suivi au niveau Européen, visant à harmoniser les politiques des Etats dans ce domaine. Ainsi, le groupe de coordination des chefs de police européens (COSPOL – Comprehensive Operational Strategic Planning for the Police) a engagé un projet dénommé CIRCAMP (COSPOL Internet related child abusive material project), dont une des missions identifiées a été de développer de bonnes pratiques dans le domaine du blocage : le « child sexual abuse anti distribution filter ».

En effet, il subsiste des paradis virtuels pour les diffuseurs de contenus illicites, hors de portée des décisions judiciaires et de la coopération policière.

Ainsi, les expériences menées en Norvège et au Royaume-Uni ont-elles pu montrer un intérêt à mettre en œuvre ce type de mesures préventives. Dans ces deux pays, il s’agit d’accords volontaires entre les pouvoirs publics et les opérateurs Internet. Les autres pays européens étudient donc des propositions similaires.

Résumé des conclusions du groupe de travail du FDI

Le FDI définit d’abord l’objectif possible d’une telle mesure:

« Dès lors, et s’agissant des sites hébergés à l’étranger, le filtrage des sites contenant des images ou représentations d’abus sexuels sur mineurs apparaît comme un levier supplémentaire permettant de lutter contre ce type de contenu. Une telle mesure permettrait également d’éviter leur banalisation. Par ailleurs, ces sites étant souvent de nature commerciale, cela limiterait leur accès à un potentiel marché français. »

Ensuite, le FDI procède à une étude juridique de la possibilité d’implémenter ce dispositif en France, qui se heurte à la fois aux dispositions des textes européens (neutralité des opérateurs définie notamment dans la directive 2000/31/CE du 08 juin 2000, mais qui prévoit aussi la possibilité pour une autorité officielle d’ordonner des mesures permettant de mettre un terme ou prévenir des violations) et aux dispositions de la loi pour la confiance dans l’économie numérique (article 6, I, 8 de la LCEN 2004-575 du 21 juin 2004, qui prévoit l’intervention d’un juge pour ordonner un blocage, comme cela fut le cas dans l’affaire AAARGH).

Partant de ce constat, le FDI propose qu’une disposition législative nouvelle vienne encadrer le dispositif, avec la création ou la désignation d’une autorité administrative qui aura pour mission de valider et de transmettre aux opérateurs une liste des sites situés à l’étranger et diffusant des images ou représentations de mineurs à caractère pornographique. Cette liste devrait être mise à jour régulièrement. L’internaute visitant volontairement ou involontairement un tel site serait redirigé vers une page d’information sur le dispositif et aucune trace de sa connexion ne sera conservée.

Cette autorité serait garante de la stricte conformité des sites bloqués aux critères définis par la loi, à savoir la diffusion de contenus rendus illicites par l’article 227-23 du code pénal et situés en dehors de l’Union Européenne.

Enfin, il est souligné que les solutions techniques ne devraient pas être imposées aux opérateurs qui resteraient ainsi maîtres de la qualité de service offerte aux Internautes pour la fourniture des services légitimes.

Le texte du rapport peut être consulté sur le site du Forum des droits sur l’Internet en suivant ce lien.

Que disent les opposants à un tel projet ?

Bien entendu, il n’y a pas de consensus général sur un tel projet. Ainsi sont évoquées la volonté de censurer l’Internet, comme cela est le cas dans des contrées moins démocratiques, la possibilité que ce dispositif soit étendu progressivement ou brutalement à des infractions dont la répression semble moins justifier des mesures aussi fortes ou surtout présente des risques techniques dans son implémentation, comme ce qui est arrivé en début d’année à l’opérateur national du Pakistan. On retrouve ces différents points dans le rapport cité supra, ainsi que sur différentes contributions publiées sur Internet comme celle de l’association « La Quadrature du Net ».

Que va-t-il se passer maintenant ?

Le débat n’est donc pas encore conclu sur ce sujet. La recommandation du FDI viendra certainement alimenter des débats à venir au Parlement, dans le cadre d’un futur projet de loi encadrant ce dispositif. Les différents acteurs sont en tous cas d’accord pour souligner qu’il s’agit avant tout d’un objectif de blocage (empêcher l’accès) plutôt que d’un objectif de filtrage (terme pouvant laisser supposer qu’on surveille les connexions de chacun des internautes français).

Vote en première lecture au Sénat du projet de loi création et Internet

Réseaux P2P

Réseaux P2P

Le sénat a donc voté hier le projet de loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur Internet.

Le texte adopté le 30 octobre est disponible en suivant ce lien.

Les débats se poursuivront en première et dernière lecture à l’assemblée nationale en début d’année prochaine, pour cause de calendrier parlementaire chargé. Ce texte passera ensuite en commission mixte paritaire, l’Assemblée nationale étant certainement amenée à voter de nouveaux amendements.

Premiers débats sur le projet de loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur Internet

Palais du Luxembourg

Palais du Luxembourg

Les premiers débats sur le projet de loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur Internet se tiennent au Sénat depuis mercredi 29 octobre au soir, avec le débat préliminaire et depuis ce matin jeudi 30 octobre le début des discussions sur les articles du projet de loi.

Le site du projet de loi sur le site du Sénat est accessible en suivant ce lien.

Parmi les amendements adoptés, on pourra noter :

  • la haute autorité (HADOPI) est dotée de la personnalité morale ;
  • la haute autorité sera saisie des faits constituant le manquement à l’obligation de surveillance de sa connexion Internet et non plus seulement « susceptibles de constituer » ce manquement ;
  • les recommandations adressées aux internautes dont la connexion a été détectée comme ayant une utilisation abusive comprendront des informations sur les moyens de contacter l’HADOPI pour compléter leur information ;
  • ces recommandations et les courriers recommandés ne contiendront pas d’information sur les contenus piratés ;
  • les recommandations et courriers recommandés sont toutefois motivés.

Reprise des débats cet après-midi à 16 heures :

  • débat sur le changement proposé par la commission des affaires économiques de la coupure de l’accès Internet par le paiement d’une amende (amendement n°75 rectifié de M. RETAILLEAU), rejeté ;
  • diminution de la durée minimum de la coupure de l’accès Internet de trois mois à un mois ;
  • notification à l’abonné de la prise de sanction par la haute autorité ;
  • labellisation précédée d’une évaluation certifiée pour les moyens de sécurisation préconisés par la haute autorité ;
  • il est demandé aux opérateurs de vérifier si « le contractant » est dans la base de données des personnes dont la connexion Internet est suspendue et non plus simplement son « nom » et ils n’auront accès qu’aux données strictement nécessaires à leur rôle ;
  • les opérateurs ne pourront conserver les données qu’ils auront obtenues depuis cette base de données ;
  • les modalités des compensations financières des prestations assurées par les opérateurs seront assurées dans les conditions du code des postes et communications électroniques (donc pas de changement sur ce point par rapport au texte du gouvernement), mais le rapporteur du projet de loi précise qu’il pourrait être envisagé de prendre en compte que dans ce cas les opérateurs ont un intérêt à ce dispositif et accepteraient de ne pas être remboursés ;
  • création d’un label délivré par l’HADOPI pour identifier les prestataires offrant des contenus protégés par les droits d’auteurs et les droits voisins dans des conditions conformes à la loi – dans le même amendement, la haute autorité sera chargée d’évaluer les expérimentations en matière de technologies de reconnaissance des contenus et de filtrage.

Ces discussions ont permis de conclure par un vote l’adoption de l’article 2 du projet de loi à 18:13.

Les articles suivants ont été discutés sans grands changements sur le fond du texte. La séance est levée à 20h56.