Et voilà, une nouvelle édition de Botconf – la conférence internationale sur la lutte contre les botnets – s’est achevée vendredi à Bordeaux. L’occasion pour moi de faire le bilan de ces 7 éditions passées et d’expliquer pourquoi ce type de conférence est nécessaire.
Ceux qui me lisent ou échangent souvent avec moi savent combien la lutte contre les botnets – et plus largement les logiciels malveillants mais j’y reviendrai – est importante. D’abord parce que c’est la forme de délinquance numérique qui se développe le plus, en témoigne l’explosion des cas d’infection par rançongiciels chiffrants ou cryptlockers au cours de la dernière année.
Observer les botnets, plutôt que les logiciels malveillants simplement, c’est se donner les moyens d’observer un système, une infrastructure. Non seulement une infrastructure de pilotage (les systèmes de commande et de contrôle ou C&C) mais aussi les systèmes de distribution des logiciels malveillants, et les différentes étapes de leur installation. Enfin, on peut aussi s’intéresser aux acteurs (threat actors en anglais) qui contribuent aux différentes étapes de la vie des botnets.
Pour aller plus loin, vous pouvez consulter l’article où je détaillais les travaux conduits dans le cadre d’une thèse entre 2011 et 2015.
Très rapidement d’ailleurs en 2011, il m’était apparu essentiel, en discutant avec la communauté française traitant de cette menace, qu’on puisse avoir une occasion d’échanger de façon ouverte avec les acteurs du monde entier. En effet, à l’époque, il y avait assez peu de conférences traitant des logiciels malveillants, souvent confidentielles, sur invitation, ouvertes à un public donné, associant peu et valorisant peu les acteurs du monde académique. A côté de cela, beaucoup de conférences de sécurité traitent parfois des botnets, mais jamais de façon spécifique. On peut saluer les conférences de Virus Bulletin, beaucoup plus ancienne et volontairement plus tournées vers l’industrie de la sécurité, mais de très bonne qualité.
Avec quelques amis et nouveaux amis, nous nous sommes lancés dans l’aventure et avons organisé la première conférence à Nantes au mois de décembre 2013. Un peu plus de 150 participants dès la première édition et un format qui s’est vite rodé (une session – track – unique où tout le monde participe à l’ensemble des présentations). Depuis nous avons rajouté des ateliers, en fait des formations à l’utilisation d’outils et de méthodes d’analyse de logiciels malveillants, de traces réseaux ou de gestion de l’information sur la menace (threat intelligence).
Le bilan de cette année est exceptionnel: plus de 400 participants de 31 pays, 50 conférenciers pour 29 présentations et 3 ateliers – 1730 minutes d’échanges en 4 jours. Un contenu très dense comme en témoigne le programme.
Chaque année, une tendance se dessine dans les sujets abordés. Cette année fut très variée et on a beaucoup parlé de collecte d’information sur la menace (threat intelligence), de botnets sur mobiles Android, et de sécurité des infrastructures (la sécurité du point de vue des hébergeurs de serveurs Internet).
Cette année enfin, deux participants réguliers de Botconf – la Gendarmerie et un éditeur antivirus Avast – ont témoigné de leur coopération réussie contre le botnet Retadup, qui n’aurait pas été possible ou plus difficilement, si la rencontre ne s’était pas faite les années précédentes pendant cette conférence.
L’année prochaine, l’équipe a choisi de donner à nouveau rendez-vous à Nantes, et donc de toujours bouger en France pour se rapprocher des différents acteurs locaux, avoir le plaisir de faire découvrir notre pays à ces centaines de visiteurs. Au-delà de la richesse des échanges techniques, je retire avant tout une formidable expérience humaine, une communauté avide d’échanges et une équipe d’organisation exceptionnelle dont la motivation et la rigueur me font grandir d’année en année. Merci à tous !